Episode 1 : Les ferrets de la Reine

"Messire Immryran, racontez-nous donc pour notre bon plaisir quelque autre histoire de vos contrées."

La voix de la Reine avait fortement retenti à la table, mais cela n'était pourtant guère utile, étant donné que tu te trouvais à quelques chaises d'elle à peine.

Les courtisans te fixaient tous, qui d'un air curieux, qui avec une haine évidente dans les yeux. Depuis ton arrivée dans le royaume d'Esmeraldia - ombre quasi-directe d'Ambre - il y a moins d'une semaine, tu es en effet parvenu à passer de la cour d'honneur à la Grande salle, puis à la chambre d'audience, puis au bout de la table de la Reine, désormais tout proche des places d'honneur.
Et il n'est que 19 heures, autant dire que tout est encore possible avant la tombée de la nuit...

Tu te demandes un peu si quelqu'un est dupe dans tout cela. La Reine, de nature grossière et peu séduisante en apparence, n'est pourtant pas réputée pour sa naïveté.

Quoi qu'il en soit, le silence s'est fait dans la pièce. Tu es, une fois de plus, le centre de tous les intérêts.

Conformément au protocole, Imrryran se lève de son siège et s'incline devant la Reine depuis sa place à la table, faisant bien attention à ne pas renverser un des plats, des verres, des sauciers, des salières et poivrières baroques qui encombrent la table. Il salue ensuite les grands du Royaume présents aux places d'honneur, car même si certains le battaient à froid il ne voulait pas être accusé d'avoir porté l'insulte, même un simple manque d'égards, le premier. Il adresse enfin un regard à quelques courtisans avec lesquels il ne s'entend pas trop mal. Enfin il revient vers la Reine.

"Votre Altesse, je vais vous faire maintenant le récit de mon voyage chez le grand Mughul, dont les terres s'étendent à quelques semaines de voyage de votre beau Royaume."

Il brosse alors le portrait rapide de cette contrée aux moeurs guerrière et aux décors barbares avant de conter plus précisément l'anecdote qu'il a choisi.

"Je me trouvais donc à la cours du Mughul quand celui-ci qui était malgré tout sous ses dehors effrayant un homme bon me dit que sa première épouse semblait malheureuse..."

Et Imrryran continue à raconter, en y mettant tout son talent, l'histoire d'une femme escroquée par un marchand de bijoux, qui demande à son mari de la venger. Celui-ci, voulant une vengeance à la mesure de son statut, décide d'attaquer le pays du marchand. Imrryran, sympathique de nature, intervient alors pour tenter d'éviter cette guerre : il propose au Mughul, qui est un grand joueur, de parier cela aux cartes. S'il gagne la guerre n'aura pas lieu, s'il perd il montrera au Mughul la route la plus rapide et la plus sûr vers le pays qu'il veut attaquer. La partie de carte est décrite comme une véritable bataille, les piques volent ras, trop de coeurs sont percés, finalement Imrryran perd. Gentilhomme, il ne peut que tenir sa parole et s'exécute. Toutefois il a promis de montrer la route, pas de mener les armées. Il la montre donc sur une carte qu'il dessine. Mais la carte n'est pas le territoire et ne montre que ce qu'on y représente. Il s'en va donc avant que le Mughul ne s'apperçoive de la supercherie, épargnant ainsi la vie des femmes et enfants de cette contrée éloignée. Enfin, jusqu'à ce que quelqu'un l'y amène vraiment, ce qui peut bien sûr arriver, mais... ne sera pas son fait en tout cas.



HRP: "ombre quasi-directe d'Ambre" sont-ils au courant pour les ambriens qui vont d'une ombre à l'autre ?

(Non, assez ironiquement les Ombres directes d'Ambre sont celles qui ont le moins de rapport avec elle. On y a tous les inconvénients d'Ambre (famille royale pourrie, complots permanents) sans les avantages (pas de pouvoir réel - peut-être un reflet de Marelle, mais qui sera inutilisable par les gens du cru), ce qui fait que les Ambriens n'ont rien à en tirer d'habitude)



Tout le monde t'a porté une impeccable attention, et lorsque tu achevas ton récit le silence ne se rompit qu'au bout de plusieurs longues secondes.

"Tout cela est fort beau, lança un quelconque reître ayant eu tendance à perdre des places à la table depuis quelques semaines, mais si j'admire la langue et l'astuce de notre ami, j'admire aussi le fait qu'il s'en sorte sans jamais avoir besoin du moindre acte de courage. Son talent pour l'esquive et la fourberie lui épargne visiblement d'avoir à disposer de hardiesse."

Le noble lève son verre à ta santé, le vide d'un trait et le repose sur la table avec tant de force que le pied s'en brise.
L'assemblée s'agite beaucoup, la Reine reste de marbre.

Imrryran s'adresse au facheux en souriant et lui lève son verre, sans nullement s'énerver, après tout il est quelque peu habitué à ce genre de choses.

"Je vous remercie pour vos compliments sur mon astuce ma langue. Il est juste dommage que mes parents ne puissent les entendre, car c'est à eux que je les dois."

Il boit alors son verre, mais d'une manière distinguée et polie, appréciant ostensiblement le breuvage, puis le repose délicatement sur la nappe brodée qui recouvre la table et reprend toujours sur le même ton courtois.

"Quant à la hardiesse et au courage, j'ai l'impression que vous ne les comprenez pas plus que l'usage de la belle vaisselle si j'en juge à ce verre que vous teniez en main il y a peu. Si vous le souhaitez un jour, quand vous vous en sentirez le courage et que je souhaiterai m'en retourner chez moi, je pourrai vous emmener voir le Mughul, si bien sûr vous ne craignez ni son armée sauvage, ni sa tendance à faire décapiter les courtisans désagréables et ceux qui rient à contretemps de ses plaisanteries."

Imrryran explique alors que la hardiesse consistant à charger l'ennemi au combat est une grande valeur à la guerre, mais qu'à la paix la vie dans la cour d'un roi barbare n'en est pas moins dangereuse. En décrivant la cour du Mughul il insiste bien sur la différence avec une cour comme celle où il est : civilisée, raffinée, de compagnie agréable, généreuse, etc.

Alors que le reste des courtisans se satisfait grandement de ton intervention, le perturbateur se tait, tout en te portant un regard riche en menaces à venir.

La Reine se montre fort enthousiaste :

"Voilà un récit qui Nous divertit beaucoup, et Nous fit apprendre bien des choses sur les moeurs sauvages des peuples lointains. Quelle bonne fortune avons-nous que d'avoir en Notre entourage un si vaillant homme !

"Messire Immryran, vous Nous distrairez j'espère à Notre repas du soir, dans Notre salon privé."

Et cela n'avait rien d'une simple espérance...
Jusqu'à présent fort guillerette après ta dernière répartie, la tablée se calma aussitôt...

Imrryran décide d'être un peu plus sur ses gardes pour les prochains jours. Il s'est fait un ennemi et, si en tant qu'ambrien il n'a pas trop peur d'être tué par un simple humain, il vaut mieux faire un peu attention qu'être surpris au mauvais moment dans une posture délicate, empoisonné ou poignardé dans le dos.

Evidemment il accepte la proposition de la Reine avec toute la politesse requise.

Il se dit que dès qu'il aura un moment il faudra qu'il sache si ce genre de choses (une invitation à dîner) est exceptionnel ou si c'est la répétition qui a fait taire la tablée.

A priori, le repas du soir en privé est réservé aux courtisans les plus en vue, et même les meilleurs compagnons que tu t'étais fait lors de ton séjour semblent prendre ombrage de cette incroyable reconnaissance.

L'après-midi est de ce fait assez tendu, avec nombre de regards en biais et paroles basses sur ton passage.

En attendant le repas j'essaie de me réconcilier quelques amis qui en ont été fachés (par exemple "c'est réellement dommage que vous n'ayez pas été choisi, vous valez bien mieux que tel qui y est...") et je me renseigne sur les personnes qui seront présentes.

La magie marche sur cette ombre ?

Oui, semble-t-il.

Apparemment, hors de son dernier favori et d'un capitaine de marine quelconque qui doit faire récit de son voyage, le salon sera des plus intime...

Bon ben je m'habille au mieux, pense à l'avance à une ou deux histoires à raconter afin de ne pas être pris au dépourvu le cas échéant, prépare mes sorts (même si ça ne sert pas à grand-chose vu que je n'ai pas encore eu le temps de les lister) et j'y vais s'il ne se passe rien d'ici là.

Et puis à tout hasard : la desription du marin ne ferait pas penser à Caine ou Gérard ?

Pas vraiment. Au mieux on te le décrit comme un beau parleur, au pire on te dit simplement : "Vous vous apprécierez sûrement"...


Tu es introduit dans les appartements privés de la Reine peu après 21h.
Le favori t'est bien connu : jeune et élancé, blond et séduisant, il avait tout pour plaire il y a quelques années. De moins en moins jeune, de moins en moins blond et de moins en moins séduisant, il sait qu'il vit ses dernières semaines à sa position et les savoure autant que les perdrix servis au dîner.

La Reine, à l'appétit fameux, ne perd cependant pas son temps, et tout en amenant des discussions sur des sujets triviaux, s'amuse follement à voir les réactions des uns et des autres. Tu constates que, pour la première fois, elle s'est permis de porter en public son fameux collier.

Le fameux marin, un dénommé Arthur, est tel qu'on te l'avait décrit : hableur et de bonne compagnie, ses récits sont éblouissants. Il parle ainsi de la traversée de la mer océane, du nouveau continent du Grand Ouest qu'il livre à la couronne. Il sait ménager ses suspens, et parle ainsi de l'irruption étonnante de plusieurs voiliers étranges depuis un banc de brouillard, qui ont abordé et assailli son expédition, ce qui explique que seul son second navire a pu revenir.
Et il mime les combats épiques l'ayant opposé aux assaillants, son duel contre un féroce guerrier en peau de bête brandissant une formidable hache, ses ruses, ses esquives, sa victoire finale, sa fuite épique de son navire amiral débordé par l'adversaire, ses manoeuvres habiles pour fuir la flottille ennemie.

La Reine, entre deux perdrix, applaudit vivement (faisant gicler la sauce un peu partout autour d'elle).

Est-ce que l'histoire du marin m'a l'air crédible ?

Est-ce que les voiliers étranges me disent quelque chose ?

En tout cas je montre mon intérêt pour le récit, notamment en lui posant quelques questions pour qu'il détaille plus certains détails.

Le problème est que le gars est au moins aussi habile dans le récit que toi. Du coup ses ficelles, si tu les connais bien, mêlent le vrai et le faux avec une adresse confondante.
A l'évidence, ses mérites sont grandement exagérés, mais il ne peut avoir tout inventé. De plus, les expéditions maritimes à travers la "Mer océane" sont un fait indubitable, et le dénommé Arthur s'est déjà illustré dans celles-ci.

Pour les voiliers, c'est une autre histoire : rien dans cette Ombre ni dans aucune Ombre voisine ne te rappelle l'architecture navale ainsi décrite - des navires assez petits, rapides, avec une seule voile - en tout cas avec l'usage agressif qui en est fait.


Arthur s'avère très content d'éveiller la curiosité de tout un chacun (à part le favori, Lord Melkit, qui commence à somnoler), et répond à tes questions avec enthousiasme. Il est déjà presque 23 heures.

Quand la Reine renverse la sauce j'essaie (avec toute délicatesse nécessaire) de l'aider à se nettoyer si aucun domestique n'est présent pour cela.

Si la Reine semble d'attaque pour une nouvelle histoire après le récit du marin j'essaie d'embrayer sur une de mes propres aventures dans un genre proche de Sindbad le marin, puisque la mode est à la mer. Il y a certainement moins de combats mais ce que je perds en action je le gagne en exotisme, n'hésitant pas à mimer (comprendre caricaturer) des habitants de pays exotiques pour amuser la Reine.

HPR: je suppose que si tu ne nommes pas les PNJ c'est que le nom n'a aucune importance et que ça ne sert à rien que je te le demande

Après au moins une heure de récit, interrompu de rires et exclamations venant de la Reine comme du capitaine Arthur, s'achève à la fois le dessert et le repas.

La Reine, aidée par un serviteur, se relève difficilement et montre un visage fort réjoui.

"Ce fut une bien plaisante soirée pour Nous. Nous espérons vous revoir tous deux dès demain matin pour Notre petit-déjeuner dans le petit jardin.

Passez une bonne nuit dans vos chambres.
Vous de même, Melkit"

La Reine se dirige vers sa chambre.

Lord Melkit reste bouche bée. Finalement, il n'aura pas eu à attendre si longtemps avant de perdre une place de choix...

Je salue comme il se doit la Reine et lui souhaite de beaux rêves.

Le capitaine semblant avoir pas mal de choses intéressantes à raconter j'essaie d'engager la conversation avec lui, voir s'il m'apprécie et si nous pourrions être amis. Un allié à la cour est toujours utile, surtout un qui a les faveurs de la Reine. Et puis avoir du matériel pour des histoires est toujours une bonne chose.

Si le courant ne passe pas je me rabats sur Melkit qui a peut-être de l'amertume à étancher.

Le Capitaine Arthur Ralig n'est pas un mauvais bougre, et s'il semble pressé d'aller se coucher il accepte volontiers de discuter avec toi.

Tu ne serais pas étonné qu'il soit une Ombre un peu déformée de ton oncle Gérard, un peu physiquement et surtout par son côté bon vivant.
Cependant, comme vous arrivez assez vite à l'embranchement des couloirs séparant vos chambres, tu n'as pas vraiment eu l'occasion d'engager une discussion poussée avec lui, d'autant qu'il ne s'attarde pas à te souhaiter la bonne nuit.

En tout cas, son comportement s'est révélé des plus amicaux, et tu n'as décelé (ni toi, ni ta canne) aucune animosité ni roublardise de sa part à ton égard.

Qu'est parti faire Melkit pendant que je racompagnais le Capitaine à sa chambre ? Enfin vers où l'ai-je vu partir avant que je ne m'éloigne ? Si je n'en ai aucune idée je vais me coucher pour être frais demain au réveil.

Melkit... Lorsque tu te souviens enfin de lui, tu te rends compte qu'il est en train de s'engager dans l'autre partie du couloir d'un pas hésitant. Il finit par héler un serviteur pour lui demander de le conduire à ses appartements.
Le serviteur a l'air surpris, presque amusé.

Je me propose gracieusement de l'accompagner. J'en profite pour mentionner de manière oblique qu'il n'est pas nécessaire que tout le palais sache qu'il se promène seul à cette heure.

Le nobliaud a la mine sombre, c'est le moins qu'on puisse dire, et se montre aussi peu loquace qu'était causant le capitaine Arthur.

Arrivé à une porte située à deux chambres de la tienne propre, Lord Melkit te salue poliment et entre sans demander son reste.

Malgré sa mauvaise humeur compréhensible, pas de sentiment d'hostilité perceptible à ton égard.


En tout cas, te voilà seul dans le couloir des chambres, si l'on excepte un ou deux serviteurs passant à intervalles irréguliers.

Si j'ai encore le temps de faire des choses sans être crevé au petit-déjeuner (ce qui ne doit pas être bien dur, je suis un ambrien aprè tout), je me dématérialise pour aller zieuter incognito dans les appartements de la Reine, histoire de voir si je peux trouver l'endroit où elle range le collier.

La seule pièce des appartements de la Reine que tu connais est son petit salon où tu as dîné.

De plus, si tu utilises ton sortilège, tu ne pourras plus revenir par le même moyen. Tu l'utilises quand même ?

Non alors, autant attendre, de toute manière je ne suis pas pressé.

Je vais me reposer pour le petit-déjeuner. S'agit-il de quelque chose aussi intime que le dîner ?

Ce n'est pas dans la même pièce, et on ne t'a pas donné de précisions, sinon que ce sera vers 9 heures.

Tes appartements d'hôte sont relativement cossus, très proches de ceux que l'on te réserve ordinairement à Ambre (ce qui n'est guère étonnant, finalement) : une grande pièce principale, un vaste lit à deux places, une table de travail, une table basse avec quelques fruits en corbeille et un pichet d'eau, des chaises, un fauteuil, un placard pour les vêtements et une pièce séparée complètement vide qui doit être aménagée selon les goûts des uns et des autres, sans doute.

Vers 7h30, un serviteur frappe à la porte, à l'évidence pour réveiller tout le monde.